Une exploitation réfractaire aux statistiques …

Pratiquée sur toute l’étendue du territoire vauclusien grâce à des conditions géographiques très favorables, l’activité apicole en Vaucluse au XIXe siècle peut-elle être quantifiée grâce aux statistiques agricoles, régulièrement établies durant tout ce siècle ? Pourrait-on ainsi connaître l’évolution des ruchers, le nombre de ruches, la production et le prix de la cire et du miel ?

Malheureusement, les recensements agricoles de la première moitié du XIXe siècle omettent le plus souvent la production apicole, peut-être le signe, d’après les historiens, d’une activité qui reste une "pratique domestique, hors de tout circuit commercial" (Albert Giraud). Sauf en 1841, date où les tableaux, dressés en application de la circulaire préfectorale du 8 mars 1841, interrogent chaque commune sur le nombre de ruches, la quantité de miel et de cire qu’elles donnent annuellement, et le prix moyen de chacun de ces produits. Très peu d’états demandés aux municipalités ont été conservés dans les dossiers préfectoraux, sans qu’il soit possible d’en connaître précisément la raison (mauvaise conservation ou bien alors non transmission de ces états par les municipalités ?)

  • Dans le dossier conservé aux Archives départementales (6 M 376), nous ne retrouvons les réponses que pour quinze communes, et seulement cinq communes ont effectivement renseigné le tableau : Avignon, Cabrières-d’Avignon, Courthézon, Lagnes et Saumanes (toutes de l’arrondissement d’Avignon) ; pour les dix autres communes, les tableaux sont indiqués « néant ». Si Avignon comptabilise 300 ruches, le chiffre s’établit à 50 ruches pour Cabrières-d’Avignon), et l’on compte moins de 30 ruches pour les autres communes. Les quantités de miel et de cire récoltés par ruches sont contrastées : entre 5 et 18 kg de miel par ruche, et de 1,2 à 10 kg de cire. 

En revanche, pour cette enquête de 1841, des états récapitulatifs dressés par arrondissement, permettent de disposer de chiffres globaux. Mais quel crédit accorder à ces chiffres ? Avignon, qui dénombrait 300 ruches dans son tableau communal, n’est plus crédité que de 55 ruches dans le tableau récapitulatif de l’arrondissement... Et quelles évolutions et comparaisons pourrait-on effectuer puisque nous ne disposons de chiffres que pour une seule année ?

  • Ce sont les arrondissements de Carpentras et d’Apt qui comptabilisent, sans surprise, le plus grand nombre de ruches en exploitation : 3 718 ruches pour Carpentras et 3 336 ruches pour Apt, et seulement 1 700 ruches pour Orange. Et les quantités de miel récolté par ruche, en moyenne, s’élèvent à 10 kg pour Avignon, 9,5 kg pour Carpentras, 5 kg pour Apt, 2 kg pour Orange. Pour l’arrondissement d’Apt, il est noté en observation une forte diminution du nombre de ruches en raison "d’hivers rigoureux et de la sécheresse qui a régné pendant plusieurs années".

Pour la seconde partie du XIXe siècle, Hyacinthe Chobaut a relevé des éléments statistiques concernant le nombre de ruches recensées chaque année en Vaucluse entre 1873 et 1896, ainsi que les quantités de miel et de cire produites ou leurs moyennes. Les chiffres restent relativement homogènes (entre 10 000 et 12 000 ruches par an), même si l’on constate une embellie en 1887 avec 17 500 ruches recensées, tandis que les années 1890-1892 sont en-dessous des 10 000 ruches.