La Résistance au féminin

En 2002, l’exposition "De l’oubli à la reconnaissance, Images de femmes" organisée par les Archives départementales de Vaucluse mettait en lumière des destins. La Journée internationale des femmes nous a donné l’occasion de remettre à l’honneur un des portraits évoqués, celui d’Yvonne de Komornicka, grande figure de la Résistance en Vaucluse.

Yvonne de Komornicka

Aînée d'une famille nombreuse, Yvonne de Komornicka, née Roeschlin (1898 Saulxures-sur-Moselotte - 1994 Avignon), part faire ses études à Paris après le premier conflit mondial. Le choc des combats, si près de son enfance vosgienne, et les interrogations sur la place des femmes ont contribué à forger cette personnalité énergique.

La seconde guerre mondiale fait de cette veuve, mère de trois filles Christiane, Wanda et Hélène, le Capitaine "Kleber". Du service social à l'écoute de Radio-Londres, de la propagande à la direction du mouvement "Combat ", Yvonne de Komornicka est un rouage essentiel de l'armée des ombres dans le sud-est. Arrêtée en octobre 1943, elle est internée aux Baumettes puis déportée à Ravensbrück.

 

La Résistance au féminin n'a pas été qu'un soutien essentiellement logistique à la Résistance organisée et dirigée par des hommes. Yvonne de Komornicka, obligée de quitter ses Vosges natales où elle a organisé un réseau d'évasion pour les prisonniers blessés, arrive à Avignon en septembre 1941. Là, œuvrant au bureau de l'aide sociale de la ville, elle devient "Kleber" le chef du mouvement clandestin "Combat" du Vaucluse jusqu'à son arrestation par la gestapo en 1943.

Kleber est la responsable du R.O.P. (recrutement, organisation, propagande) de "Combat " pour le Vaucluse, à l'intérieur de la région R2 (le sud-est de la France). Après sa rencontre avec Jean Moulin, elle fédère dans le M.U.R. (mouvements unis de la Résistance) les organisations de la Résistance vauclusienne et fait distribuer journaux et tracts.

Ses filles participent à cette partie visible des activités des mouvements clandestins qu'est la distribution de tracts. La vie des quatre femmes est très intense, mais la gravité des temps s'accélère avec la multiplication des arrestations à Marseille et Avignon. Le 28 octobre 1943, Yvonne de Komornicka est arrêtée dans son bureau de l'aide sociale à la mairie d'Avignon.

Arrêtée par la Gestapo, la résistante est internée aux Baumettes puis déportée. C'est une "NN", une "Nuit et Brouillard", ceux qui ne doivent pas revenir. Durant sa détention, ses filles n'auront aucune nouvelle. Elle est à Ravensbrück, "l'enfer des femmes" ; dans ce camp de concentration passèrent 115.000 déportées venues de tous les pays. À cause du nom polonais de son mari, Yvonne de Komornicka n'a pas échappé aux "expériences médicales" nazies qui utilisaient les Polonaises comme matériau de laboratoire, mais elle survivra.

Entre 1939 et 1945, plus de 130 000 prisonnières passèrent par le camps de Ravensbrück. Entre 20 000 et 30 000 y périrent. Sur les 10.000 Françaises du camp, seules 3.000 reviendront ; elle sera parmi les 300 femmes  "NN" rapatriées par le comte Bernadotte et la Croix Rouge suédoise. Après l'arrestation de leur mère, les filles continuent la lutte clandestine et à grands coups de pédalier sillonnent la région. Wanda  a repris le service social du mouvement "Combat" et transporte secours, messages ou armes. La bicyclette de Christiane , endommagée lors des bombardements d'août 44, sera réparée pour reprendre du service jusqu'à la Libération, et celle de Wanda sera volée par un Allemand en mal d'exode.

Après la Libération, les deux sœurs s'engagent dans les services de rapatriement des prisonniers et déportés. Avec la Mission militaire de liaison administrative (MMLA) Wanda suit l'armée Montgomery et reçoit un choc en découvrant les camps de déportés comme celui de Belsen Bergen. Avec l'armée canadienne, Christiane arrive à Oberlangen, le camp des Polonaises survivantes du soulèvement de Varsovie. Mais ce n'est que le 14 juillet 1945, à l'hôtel Lutécia à Paris où arrivent les déportés rapatriés, que Christiane et Wanda retrouvent leur mère.

L'ancien chef du groupe "Combat", de retour à Avignon, reçoit la croix de guerre  avec palmes en 1946, et la Légion d'honneur en 1948.

En septembre 1999, en inaugurant une rue à son nom, la ville d'Avignon remet en lumière une héroïne de l'armée des ombres.

 

Autres sources sur la Résistance (non exhaustives)

Aux archives de Vaucluse

  • Documents, photocopies de documents, témoignages et récits sur la Résistance, 1 J 345
  • Enregistrements (numérisés) de témoignages sur la Résistance (1978-1980), 1 J 346
  • Dossier pédagogique Le Résistance en Vaucluse (Biblio 1911/8)- Guide des sources conservées en France sur la 2e Guerre mondiale, Archives nationales, 1994 (extrait)
  • Archives privées : Fonds Max Fisher, 177 J ; COSOR, 79 J ; Associations issues de la Résistance et de la déportation, 80 J ; ADIF 84, 187 J ...

Voir aussi

Musée d’Histoire Jean Garcin 39 – 45, l’Appel de la Liberté

Association des combattants volontaires de la Résistance de Vaucluse et des départements limitrophes

Témoignage d'Yvonne de Komornicka, recueilli par Marie Granet, sur le site des Archives nationales

Le Vaucluse dans la guerre / Hervé Aliquot sur le site Gallica

Maquis Ventoux : Résistance et répression en Provence pendant la IIe guerre / Claude Arnoux sur le site Gallica