Inventaire

L’école, un enjeu pour le village de Saint-Trinit

En 1835, un petit village vauclusien dont les terres jouxtent les Alpes-de-Haute-Provence prend une grande décision au regard de sa modeste superficie : Saint-Trinit doit se doter d’une maison d’école.

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L’intention de la municipalité est entérinée le 25 novembre 1836 par une ordonnance royale de Louis-Philippe. Si la maison d’école voit effectivement le jour, elle va souffrir d’un manque de moyens constant.

En 1857, à la suite du rapport de l’inspecteur d’arrondissement, le sous-préfet de Carpentras adresse un courrier au préfet de Vaucluse dans lequel il évoque le logement de l’instituteur et la salle de classe « bien loin de satisfaire aux besoins ». En 1869, le maître alors en fonction, réclame davantage de mobilier et de fourniture pour sa classe ; le certificat d’acquisition signé le 7 mars 1870 de la main de l’instituteur pour la commune, énumère les objets acquis : une méthode de lecture ; 4 cartes géographiques (mappemonde, Europe, France, département de Vaucluse) ; un tableau noir ; un tableau de système métrique ; un christ avec son emplacement ; un buste de l’empereur avec emplacement ; pelle, pinces, soufflet et arrosoir. Outre le matériel qui fait fréquemment défaut, la commune doit envisager l’agrandissement de la maison d’école voire la construction d’un nouvel établissement.

C’est dans la perspective d’un nouveau bâtiment que l’architecte départemental Louis Valentin adresse en 1883 au maire de Saint-Trinit un bordereau de prix pour une nouvelle école puis un second devis en 1887 pour le mobilier scolaire. Dans une enquête datée du mois d’août 1884, l’inspecteur du primaire insiste sur la nécessité pour la commune -dont le dernier recensement comptabilise 248 âmes-, de se doter d’une nouvelle école mixte. Pour satisfaire cette obligation, il évoque ses faibles ressources et la participation de l’État et du département dont elle doit bénéficier dans une large proportion. De courriers pour dossiers incomplets, en délibérations et rapports, le projet avance lentement, en raison notamment de la situation financière de la commune contrainte de souscrire un emprunt.

En 1889, la municipalité trinitosantaise obtient pour la construction de son école la promesse de vente d’un terrain appartenant à Xavier Roux. La parcelle est située « au midi du village, au lieu-dit Le Coin, confrontant du levant le chemin vicinal de Saint-Christol, du midi la partie restante, du couchant les hoirs de Fournon Xavier, et du nord, la route départementale d’Avignon à Forcalquier ». Les plans et les devis pour la construction et l’acquisition de mobilier scolaire dressés par l’architecte départemental Louis Valentin, sont approuvés par le préfet en 1888. L’architecte confie ensuite la direction et la surveillance des travaux « pour moitié des honoraires » à César Bres, architecte à Carpentras. Jean Baptiste Constantin, entrepreneur à Sault, est désigné par adjudication pour la construction.

En janvier 1891, il gèle à pierre fendre à Saint-Trinit et le maire Fournon, dont la sollicitude pour les maçons, n’a d’égal que son inquiétude de l’impact du froid sur les matériaux, sollicite du préfet un report des travaux pour cause d’intempérie. D’autres retards s’enchaîneront. Une inspection réalisée par le contrôleur Olagnier le 18 novembre 1892 permet enfin d’envisager le transfèrement de l’école le 1er janvier 1893. Ce n’est que le 10 avril que le certificat de réception des travaux est enfin signé.

Le premier instituteur enregistré dans l'unique registre matricule conservé, est Irénée Jean, il est nommé le 27 août 1904 mais il faut attendre le 17 janvier 1908 pour qu'un premier élève figure dans ce même registre qui recense aussi bien le personnel que les écoliers. L'exode rural faisant son œuvre, l'école à classe unique, perd progressivement ses effectifs. Dès 1970, elle est sur la liste des établissements voués à disparaître. Si le préfet accepte de sursoir cette année-là puis les trois suivantes, il entérine lors d'un comité technique paritaire la fermeture de l'école primaire de Saint-Trinit pour la rentrée 1973-1974, décision prise contre l'avis du conseil municipal et du conseil départemental de l'enseignement. L'établissement ne compte en effet plus que 5 ou 6 élèves alors que le seuil est fixé à 15. Les écoliers finiront leur scolarité dans le village voisin, à Sault. Le dernier enseignant mentionné dans le registre est une institutrice, dont on peut supposer qu'elle ferma définitivement les portes de l'établissement.

Le fonds d'archives de l'école primaire de Saint-Trinit, est certes peu volumineux mais il offre une vision assez représentative du fonctionnement d'une petite école de village des années soixante au début des années soixante-et-dix. Outre les documents administratifs de gestion de la population scolaire, on trouve des fiches et des notes pédagogiques de l'enseignant, un cahier d'écolier, une photo de classe ainsi que des dossiers sur la médecine scolaire, les œuvres périscolaires et les syndicats professionnels.