Apiculture à Bedoin

Un témoignage sur l’apiculture traditionnelle telle qu’elle se pratiquait au milieu du XIXe siècle

Ce témoignage nous est offert par le maire de Bedoin, dans un article publié en mai 1864 dans la revue "L’Apiculteur" dit aussi  "Journal des Cultivateurs d’Abeilles, Marchands de Miel et de Cire" et repris en juin 1864 dans le "Bulletin de la Société d’agriculture et d’horticulture de Vaucluse" ci-contre. L'auteur dispense conseils et techniques sur la manière d'exercer l'apiculture au pied de cette belle région du Ventoux, où la vie des abeilles est rythmée par les saisons.

La ruche traditionnelle

L'article détaille en premier lieu les caractéristiques de la ruche traditionnelle, taillée dans un tronc d’arbre creux, ou à défaut dans quatre planches de bois : c’est la ruche « tronc » ou « brusc » (du latin bruscum : nœud de l’érable). Une croix, constituée de deux barreaux de bois fixés dans la paroi du tronc sépare l’intérieur en deux parties : les abeilles y construisent leurs rayons de part et d’autre. Pour ménager un passage aux abeilles, le devant de la ruche est percé de plusieurs petits trous, tandis qu’une pierre plate bouche complètement le dessus, garantissant ainsi l’étanchéité de l’habitacle.

La ruche-tronc :

Tronc d’arbre creusé ou en écorce de chêne-liège (ruche : du latin rusca, écorce), telle semble être la première ruche utilisée par l’homme d’après les ouvrages d’apiculture. Cette ruche était utilisée plus spécifiquement dans le Midi de la France. Le tronc d’arbre était parfois remplacé par une caisse faite de quatre planches clouées, mais le principe en était le même : les abeilles bâtissaient leurs rayons à leur guise car il n’y avait pas de cadre pour guider la construction. Dans d’autres régions, les ruches étaient bâties le plus souvent en paille ou en osier, parfois en poterie de diverses formes….

L’essaimage

Moment où la colonie d’abeilles se divise en deux populations : une partie des abeilles qui quitte la ruche avec la reine pour fonder ailleurs une autre colonie, tandis que le groupe d’abeilles restant veille à l’élevage d’une nouvelle reine qui va assurer la relève. 

La transhumance

Pratique qui permet de suivre les différentes floraisons : au Ventoux, les ruches sont déplacées depuis la plaine au mois de juin, à la saison où "les fleurs de la plaine disparaissent" et où fleurissent en montagne les plantes riches en nectar dont les abeilles raffolent (lavandes, thym….). L’emplacement du rucher ou "apier" est soigneusement choisi : à l’abri du vent du nord, bien exposé au soleil… les ruches s’alignent dans un bel ensemble… 

La « capture » des essaims

Ou comment agrandir son cheptel d’abeilles : "prendre une ruche dont on aura frotté l’intérieur avec du thym en fleur, l’incliner près de l’essaim, puis frapper avec une baguette sur le couvercle de la ruche, sous prétexte que ce bruit fait précipiter les abeilles dans l’intérieur de la ruche". On aura pris soin au préalable de placer face aux « apiers » des branches de chêne vert ou de pin afin de retenir les essaims  qui pourront s’y suspendre, et les recueillir ainsi plus facilement.  

Le temps de la récolte

Pour prélever le miel, on étouffe les abeilles à l’aide d’une mèche soufrée ! Les bâtons qui soutiennent les rayons sont sectionnés et on vide la ruche dans un baquet. C’est ce qu’on appelle la "taille des ruches" et en provençal "cura leis brus". Les plus beaux rayons, exempts d’abeilles mortes, seront mis à égoutter et donneront le miel vierge.