Faire vivre la musique du XVIe siècle aux XXe et XXIe siècles

Il est assez rare d’entendre encore chanter régulièrement des mélodies composées au XVIe siècle par Elzéar Genet. Néanmoins, il existe un endroit dans le Vaucluse où l’on n’a pas oublié ce compositeur : la cathédrale Saint-Siffrein de Carpentras.

Bonaventure Laurens

Chaque année au mois de novembre, la vénération de saint Siffrein est associée à celle du saint Clou lors des Vêpres de Saint-Siffrein. Institués après la grande peste de 1720, les cultes de saint Siffrein et du saint Clou disparaissent à la Révolution. La tradition des Vêpres chantées reprend au XIXe siècle grâce à l’intervention de Bonaventure Laurens. Cet aventurier, poète, musicien et historien carpentrassien, participe à partir des années 1870 à la renaissance des Vêpres en jouant les airs à l’orgue. Il parvient à faire transcrire en notation moderne un Magnificat du 6ème ton, par Henri Bellermann paléographe musical de l’Université de Berlin. En novembre 1886, s’associant avec le maître de chapelle Auguste Alary, ils ajoutent ce Magnificat sexti toni de Genet au répertoire des Vêpres de Saint-Siffrein.

Une postérité assurée

Afin de perpétuer la tradition et cette culture carpentrassienne, Joseph Marie Philippe Eysseric, explorateur-géographe et artiste peintre dépose un testament olographe le 9 avril 1932 chez le notaire Maurice Falque de Carpentras. Ouvert après son décès le 5 juillet 1932, ce testament prévoit d’employer les revenus des biens du capital légué « afin de développer la vie intellectuelle à Carpentras, à étendre le renom scientifique, littéraire et artistique de Carpentras, par le perfectionnement et l’extension des éléments de haute culture que la ville possède déjà… Sur ces revenus, il sera alloué : 1. Mille francs au moins chaque année, pour subventionner le Maître de Chapelle de la Cathédrale de Saint-Siffrein, les Chœurs et l’Orchestre, à la condition qu’on exécute dans la Cathédrale, les 26 et 27 novembre, suivant la tradition, les Vêpres Solennelles comportant (au moins partiellement) le Dixit de Lalande, le Beatus Vir de Boudou, L’Hymne de Papet, et autant que possible le Magnificat d’Elzéar Genet, dit Carpentrasso. »

Depuis 1946, la Schola Elzéar Genet exécute les chants dans cet ordre :

  • L’Hymne à saint Siffrein de Jean-Pierre Papet (1693-1759)
  • Le Dixit Dominus de Michel Richard de Lalande (1656-1726)
  • Le Beatus Vir de Joseph Boudou (1686-1762)
  • Le Magnificat d’Elzéar Genet (1470-1548)

 

De nos jours encore, cette tradition se perpétue…

Sources :

  • Pierre AVON, Elzéar Genet –dit-Carpentras-, Études Comtadines, Pernes-les-Fontaines, 2012
  • Robert CAILLET, Les Vêpres de Saint-Siffrein à Carpentras, Cavaillon, 1956
  • Pierre PANSIER, Histoire du livre et de l’imprimerie à Avignon du XIVe au XVIe siècle, tome II, Aubanel, Avignon, 1922
  • Chanoine REQUIN, Elzéar Genet dit il Carpentrasso, Mémoires de l’Académie de Vaucluse, tome XVIII, année 1918, Seguin, Avignon, 1918, p. 1-14