La « production » de la loi et sa diffusion auprès des citoyens

La citoyenneté se révèle par l’existence d’une communauté dont les membres partagent le projet de vivre ensemble. Elle se construit et s’entretient grâce à des cadres dont la loi est la forme par excellence. Pour être respectée, celle-ci doit être dite, écrite, connue de tous.

La Constitution délègue exclusivement au Corps législatif les pouvoirs et fonctions (…) de proposer et décréter les lois…
Constitution de 1791, Titre III, chapitre III, section 1ère, art.1

Les délibérations du Corps législatif seront publiques, et les procès-verbaux de ses séances seront imprimés.
Constitution de 1791, Titre III, chapitre III, section II art.1

De la réunion des pouvoirs...

Sous l’Ancien Régime, la séparation des pouvoirs entre le législatif et le judiciaire n’existe pas, et c’est une grande diversité d’acteurs et de pratiques qui domine ; le pouvoir de faire la loi est un acte de justice, et si le souverain, qu’il s’agisse du roi de France, ou du pape dans les États pontificaux, réunit entre ses mains ce pouvoir comme celui d’exercer et de rendre la justice, il est loin d’être le seul.

Le roi et le pape doivent s’accommoder du système féodal qui permet au seigneur de faire sa loi et de l’exécuter sur ses terres, mais aussi des coutumes et privilèges des corps, communautés et provinces auxquels il est impossible de toucher, si ce n’est de les collationner et de les publier. Le droit canon régi par l’Église, et le droit civil, issu du droit romain et de la coutume, constituent aussi des domaines sur lesquels le pouvoir temporel n’a aucune prise.

À partir du XVIIe siècle, les monarchies française et pontificale sont parvenues à mettre un frein à cet éparpillement des sources du droit, en intervenant et en codifiant « l’administration publique » par des règlements, des ordonnances, des édits.

... à la constitution d'un corps législatif

Sérieuse limite aux pouvoirs du souverain et de ses magistrats, cette diversité des droits, héritage des siècles antérieurs, ne disparait qu’à la Révolution. Dans son œuvre législative, celle-ci unifie l’ensemble du système en confiant désormais à la seule représentation nationale (corps législatif) le pouvoir d’écrire la loi.

Reprenant les usages de l’Ancien Régime, la diffusion auprès des administrés continua de s’appuyer sur les corps intermédiaires ; à la lecture publique des règlements en chaire par les curés, ou sur les places et carrefours à son de trompe par les agents des communautés, la Révolution élargit cette diffusion par la création du moniteur puis journal officiel et par l’édition des lois et décrets au moyen des multiples imprimeries locales ; elle ordonne la transmission des principaux textes législatifs et règlementaires jusqu’aux citoyens en prenant appui sur les différents échelons de l’administration territoriale.

De cette époque date le principe de l’entrée en vigueur d’une loi un jour franc après la réception du journal officiel en préfecture. 

Ill. :
Recueil des principaux règlemens […] concernant la cité d’Avignon et le païs du Comté Venaissin, imprimé à Avignon en 1670, contenant la bulle Super bono regimine dite « du bon gouvernement » du pape Clément VIII pour l’administration des États de l’Église (15 août 1592) (Bibliothèque des archives 237)

Publication des statuts de Bedoin, ordonnés par le seigneur du lieu, qui se fait annuellement aux granges de Saint-Blaise, devant la porte de l’église. 3 février 1688 (AD Vaucluse B 1399, actes de la cour de Bedoin, fol. 49)

Lettre d’envoi des décrets de la Convention nationale au procureur syndic du département de Vaucluse pour être déposés au secrétariat. 3 octobre 1793 (AD Vaucluse 1 L 141)
Registre d’exécution des lois et des arrêtés du Directoire exécutif, portant leur date et celle de leur réception, ouvert le 20 germinal an IV (AD Vaucluse 1 L 76)

Décrets de la Convention nationale, impression d’Avignon, chez Vincent Raphel, imprimeur du département. 1793 (AD Vaucluse 1 L 56)

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